L’observatoire de la Laïcité : Audition du Président d’Honneur du Conseil Français du Culte Musulman, Mohammed Moussaoui

Le Conseil Français du Culte Musulman (CFCM) qui a toujours réaffirmé, depuis sa création en 2003, son attachement profond aux principes fondateurs de la République, considère que La laïcité est un des piliers de notre pacte républicain, un des supports de notre démocratie, un des fondements de notre vouloir vivre ensemble.

Dans notre pays, des millions de croyants se rendent paisiblement à l’office religieux de leur choix et des millions d’autres s’abstiennent de le faire en toute liberté. Les emplois et les charges publiques ne sont pas définis selon des critères religieux. La réussite de la laïcité est que cela nous semble normal alors que cette double réalité est récente, au regard de l’histoire.

L’existence de nombreux espaces de dialogue serin et paisible entre les pouvoirs publics et les cultes, l’existence de l’observatoire de la laïcité et sa démarche participative, témoignent de cette volonté partagée de veiller à ne pas dilapider ce précieux acquis.

La volonté des responsables de culte en France d’approfondir leur connaissance mutuelle, par le sentiment de contribuer ensemble à la cohésion de notre société dans le respect des autres courants de pensée, et par la reconnaissance de la laïcité comme faisant partie du bien commun de notre société, a amené les instances responsables du Bouddhisme, des Églises chrétiennes (Catholique, Orthodoxe, Protestante), de l’Islam et du Judaïsme à créer « la conférence des responsables de Culte en France », le 23 novembre 2010. C’est ainsi que le 30 mars 2011, ces responsables ont écrit dans une tribune commune : « Nous signons ensemble cette tribune sans aucun esprit polémique ou partisan. Une parole commune nous semble néanmoins nécessaire. Notre cohésion au sein de la Conférence que nous avons fondée, est significative dans notre société française. Elle a été rendue possible grâce notamment au climat de coopération instauré entre les religions, que la

« laïcité à la française » et ses évolutions depuis plus d’un siècle ont permis ».

Dès 1905, la discussion autour de la rédaction de l’article 4 de la Loi du 9 décembre 1905, consacré à l’organisation des Eglises, a donné l’occasion à Aristide Briand rapporteur de la loi d’en préciser la philosophie et les objectifs en qualifiant d’ « état de fait » la pluralité religieuse de la société française et le devoir premier du législateur de ne rien faire qui soit contraire au respect de cette pluralité.

Jaurès dira dans un compte rendu à ses électeurs : « La loi que la chambre a votée laisse la liberté à tous les cultes…, La liberté de conscience sera garantie complète, absolue ; la loi de séparation, telle qu’elle est, est libérale, juste et sage ».

Aristide Briand avait indiqué qu’« en cas de silence des textes ou de doute sur leur portée, c’est la solution libérale qui sera la plus conforme à la pensée du législateur ». Ainsi lors des débats autour du projet d’interdiction de porter la soutane dans l’espace public en 1905, Aristide Briand a opposé qu’il serait contradictoire d’interdire le port de la soutane quand on instaure, par la séparation, « un régime de liberté » et qu’avec la laïcité, la soutane devenait « un vêtement comme les autres ».

Les débats qui ont suivi la publication, en mars 2013, de deux arrêts de la Cour de cassation en matière de manifestation de l’appartenance religieuse sur le lieu de travail, ont mis au jour une méconnaissance de la laïcité, tantôt réduite à un simple principe de tolérance, tantôt déformée jusqu’à réclamer un rejet de tout signe religieux dans l’espace public.

Source : Observatoire de la Laïcité/ 04 février 2014

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