Rencontre de Marseille- 24 janvier 2015 Sur le phénomène de la radicalisation

A l’initiative du Conseil Régional du Culte Musulman de la Région PACA (CRCM-PACA), avec le soutien de la Fondation d’aide aux victimes du terrorisme, plus de 150 imams et aumôniers se sont retrouvés ce samedi 24 janvier 2015, pour réfléchir ensemble sur ce qu’il convient de faire face au phénomène du radicalisme qui touche une frange de la jeunesse française.

La participation de centaines de jeunes français à des combats au sein de groupes terroristes en Syrie et en Irak, dont Daech, n’a cessé depuis plus de deux ans. Les actes de terrorismes qui ont frappé ces derniers jours notre pays et ont fait 17 morts parmi nos concitoyens, renforcent le besoin d’une réflexion commune sur ce phénomène et viennent nous rappeler l’ampleur du danger que représentent ces jeunes radicalisés pour eux-mêmes, pour la paix, la sécurité et la cohésion nationale de notre pays.

Après une présentation du cadre de cette initiative par le président du CRCM-PACA, monsieur Khalid Belkhadir, la réflexion s’est déroulée en deux parties. La première a été consacrée aux échanges avec des universitaires et des acteurs institutionnels engagés dans la lutte contre le radicalisme, dont le Préfet des Bouches-du-Rhône, M. Michel Cadot qui a rappelé l’importance d’une mobilisation de tous, la nécessité de rejeter tout amalgame entre islam et terrorisme et l’importance du principe de Laïcité comme un des fondements de notre Pacte Républicain. Le Préfet Pierre N’GAHANE, Secrétaire du Comité Interministériel de Prévention de la Délinquance, a apporté un éclairage très utile quant à la politique de prévention mise en place, via la coordination des initiatives des préfectures et l’organisation de cellule dédiée au soutien des familles et à la prévention de la radicalisation. Frank Fregosi, universitaire à l’IEP d’Aix -en-Provence, a présenté une analyse assez détaillée et documentée de l’aspect sociologique de la radicalisation. Mohammed Moussaoui, président d’honneur du CFCM et président de l’UMF a, quant à lui, rappelé, par de nombreuses références théologiques, que le discours radical est en totale contradiction avec les principes et les valeurs qui fondent la religion musulmane. Le politologue Asiem El Difraoui a présenté le contexte international, en particulier en Syrie et en Irak, qui s’inscrit dans une évolution et un développement du « jihadisme » né dans les années 80. Il a présenté les ressorts non religieux de la radicalisation, en particulier les spécificités de la propagande développée par Daesh. Abdalah Zekri, président de l’observatoire contre l’islamophobie a, pour sa part, attiré l’attention sur la recrudescence inquiétante des actes antimusulmans à la suite des événements tragiques de ces derniers jours.

La seconde partie, sous forme de table ronde, a été consacrée à une réflexion sur la manière dont les imams pouvaient faire face à la radicalisation. Ainsi, étaient présents autour de la table, Mohamed Aiwaz, professeur à l’institut El Ghazali de la Grande Mosquée de Paris, Mohsen Ngazou, imam de la mosquée Ibn Khaldoun, Abderrahmane Ghoul, vice-président du CRCM-PACA et imam de la mosquée Tahara, Haroun Derbal, imam de la mosquée Islah et Ahmed Ndiguen, imam de la mosquée Bilal.

A l’issue de cette journée de réflexion, d’échanges et de propositions, les participants parmi les imams, aumôniers et responsables musulmans ont réaffirmé, leur engagement à poursuivre leur mobilisation dans le cadre de la mission qui est la leur et à apporter toute leur contribution à l’effort national en matière de lutte contre la radicalisation et d’éducation aux valeurs qui fondent notre vivre ensemble. Ils proposent par la même occasion :

1. De trouver le moyen de pérenniser ce type de rencontre qui pourrait passer par la création de conseils des imams et d’aumôniers au niveau de chaque région.

2. L’enseignement religieux dispensé dans les mosquées, les écoles et instituts doit fixer parmi ses objectifs de donner aux jeunes des clefs de compréhension et des « filtres de connaissances » qu’ils leur permettent de faire face aux idées et aux propagandes extrémistes. Cet enseignement doit insister davantage sur les valeurs qui rassemblent et créent le lien entre tous les citoyens.

3. Le prêche du vendredi, un rendez-vous hebdomadaire très important dans la vie religieuse des musulmans, doit retrouver le rôle qui est le sien comme moyen d’enseignement et d’élévation spirituelle. Son contenu sur le fond comme sur la forme doit faire l’objet d’un travail collégial digne des défis auxquels sont confrontés les musulmans de France.

4. Partant de la parole de sagesse musulmane « l’Amour de la Patrie est le fruit d’une foi sincère », les imams sont appelé à élever une prière pour la République française et pour le peuple français à l’occasion du prêche du vendredi et des rencontres et cérémonies religieuses.

5. Participer activement au dialogue inter-religieux qui n’est pas une option, mais un devoir et une nécessité pour la paix et la cohésion nationale. La reconnaissance mutuelle doit se traduire par un discours des imams présentant avec estime et respect le choix de nos concitoyens en matière de conviction ou de religion.

6. La condamnation des exactions et cruautés commises par des individus se réclamant de l’islam doit être systématique si ces actes se seraient produit en France, et dans la mesure du possible dans les autres cas.

7. Les imams, tout en dénonçant les actes d’hostilités qui les visent les musulmans de France et les symboles de leur foi, doivent appeler sans cesse les musulmans de France à avoir une attitude digne et à ne céder en aucun cas à la provocation qui ne profite qu’aux extrémistes.

Les participants saisissent cette occasion pour appeler les institutions musulmanes à l’unité et à une meilleure coopération entre elles dans l’intérêt de tous.

Ils appellent les parents à s’investir davantage dans l’éducation de leurs enfants confrontés à des réalités complexes et des risques accrus.

Ils appellent les musulmans de France à participer activement à toute action citoyenne et à tout effort national pour préserver l’unité et la cohésion nationales.

Prière

Que la France vive heureuse et prospère qu’elle soit forte et grande par l’union et la concorde.

Seigneur ! Le Clément, Le Tout Miséricordieux,

Regarde avec bienveillance notre pays la France,

Bénis et protège la république française et le peuple français,

Fait à Marseille le 24 janvier 2015

Pour les participants, Le CRCM-PACA

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