Laïcité
Étymologie : Le mot « laïc », apparu au XIIIe siècle et d’usage rare jusqu’au XVIe siècle, est issu du latin laicus « commun, du peuple (laos) », terme ecclésiastique repris au grec d’église λαϊκός, laikos, « commun, du peuple (laos) » par opposition à κληρικός, klerikos (clerc) désignant les institutions proprement religieuses. Le terme laicus est utilisé dans le vocabulaire des églises chrétiennes dès l’Antiquité tardive pour désigner toute personne de la communauté qui n’est ni clerc, ni religieux ; c’est-à-dire profane en matière de théologie. Cependant, elle appartient bien à l’Église, dans le sens qu’elle en suit le culte (l’incroyance étant alors inconcevable à l’époque) ; et peut même y exercer des fonctions importantes. L’abstrait désignant cette position a donné en français le terme « laïcat ». Au Moyen Âge, le mot « laïc » distingue l’homme commun, qui doit être enseigné, de l’individu instruit consacré par son état religieux7.
Le concept de laïcité, en tant que séparation du pouvoir ecclésiastique et du pouvoir séculier, est ancien, mais ne s’exprime pas d’emblée dans le champ lexical du laïcat. Au Ve siècle, le pape Gélase Ier conçoit le premier dans une lettre à l’empereur Anastase, la distinction entre le pouvoir temporel (potestas) et de l’autorité spirituelle (auctoritas)8. Cette lettre, préfigurant la doctrine médiévale9 des deux glaives10, devient à fin du XIe siècle l’un des textes clefs invoqués pour soutenir la supériorité de l’autorité pontificale sur la potestas impériale. Mais l’usage qui en est fait alors, dans l’optique de la séparation du regnum et du sacerdotium, provient de l’importance excessive accordée à ce qui est en fait une citation altérée de la lettre de Gélase, qui mentionnait « deux augustes impératrices gouvernant le monde »11. La distinction entre potestas et auctoritas tente d’établir une hiérarchie : le pouvoir politique serait moralement soumis à l’autorité. Cette dichotomie entraîne des réactions qui se traduisent notamment par la lutte du sacerdoce et de l’Empire ou par les mouvements hérétiques des XIVe et XVe siècle qui contestent au clergé cette mainmise spirituelle7
Aujourd’hui, un usage courant et erroné de l’adjectif laïc lui donne, appliqué à un individu, le sens de « non-croyant », « athée » ou « neutre idéologiquement », alors que le mot désigne l’homme commun par opposition à celui qui est entré dans les ordres.
Cet usage erroné provoque souvent une confusion sur le principe de laïcité (principe de neutralité pour un État ou une institution, et non pour un particulier, à moins qu’il ne s’exprime en tant que représentant de l’État), et donne parfois lieu à une interprétation abusive de ce principe, entendu alors comme l’obligation, pour un particulier ou un groupe de particuliers, d’être neutre (sur le plan idéologique ou religieux) quand il s’exprime dans la sphère publique, ce qui est contraire à la notion de liberté d’expression.
En réalité le principe de laïcité, qui implique une séparation des pouvoirs, n’est pas contradictoire avec le fait par exemple que la société civile s’exprime auprès d’un gouvernement à travers des organisations religieuses et leurs responsables.
Source : Wikipédia